27 décembre 2006

Revue de presse # 7

Je vous en avais donné un premier aperçu.

Un comparatif Rieju Tango 125 / Yamaha Tricker 250 (MOTO2 - n°202 - nov. 2006 - p.78 à 81).




RIEJU TANGO 125 vs YAMAHA TRICKER 250

DUO D’ACROBATES


A mi-chemin entre un trial et un vélo cross, la Yamaha Tricker 250 est destiné à un usage ludique plus qu'utilitaire. Déguisé en citadin, il séduit par sa facilité à se faufiler dans le trafic urbain, tout en offrant des facultés â descendre les marches ou à sauter d'un trottoir à l'autre. Esthétiquement très proche, le nouveau Tango 125 de Rieju, de par sa cylindrée cible une clientèle plus jeune, aussi bien d'habitués du deux-roues que de détenteurs du permis B.

Croiser ces machines en ville peut susciter le rire et l'étonnement des passants. Même les motards s'y prennent à deux fois pour confirmer que leurs yeux viennent de voir des trials homologués sur route! La tendance actuelle à la répression et le déploiement des radars favorise grandement la multiplication de ces "bestioles". Marre d'être concentré sur le compteur ou de repérer les points bleus au bout des avenues pour préserver son permis ? Le Tricker et le Tango jouent de leur faible puissance pour éviter le pire. Faciles, funs et pleines de charme, ces petites cylindrées vous accordent un peu de bon temps...

POIDS PLUME ET FITNESS
Ces motos sont dépourvues de tous les éléments utilitaires pour gagner en poids et en facilité. Pourtant, Yamaha n'a pas lésiné sur la finition du Tricker. La couleur noir mat qui recouvre le cadre double berceau, la fourche grand débattement et le bras oscillant reflètent un bel effet de qualité. Le réservoir orange de 6 litres joliment dessiné et frappé du diapason possède un bouchon d'essence à serrure. La selle bicolore placée à 790 mm laisse le pilote perplexe sur son confort, mais sa largeur promet d'accueillir convenablement le pilote. Le compteur, agréable à lire, rappelle celui de la MT-03. II intègre le strict minimum de voyants : clignos, phare et point mort. On remarque l'absence d'un compte-tours. Un régime qui donne 118 kg à sec ! On trouve un traditionnel robinet d'essence à manipuler avec prudence lors du passage en réserve : il faut écarter franchement la cuisse pour y accéder. Le starter manuel est placé à gauche du cylindre.

La cure d'amincissement du Rieju est quasi identique. On emporte le minimum pour préserver une fine silhouette de 101 kg à sec. La selle étroite parait plus haute, mais est aussi à 790 mm. Le réservoir jaune flashy semble une prolongation naturelle du cadre. On regrette son bouchon juste vissé muni d'une fausse serrure. Dommage, même s'il n'embarque que 5,5 litres. Le compteur hi-tech digital affiche une liste complète d'informations. Tellement complète, qu'au début on se mélange un peu les pinceaux entre les deux trips, l'horloge, le chrono, les témoins de réserve, le compte tours, etc. Le bouton associé n'arrange pas les choses et l'on doit s'y prendre à plusieurs reprises pour déclencher le défilement des infos. Le starter est à portée de main puisque sa gâchette se situe en-dessous des commodos. Le robinet d'essence est aussi de rigueur pour le Tango.

MODE D’EMPLOI : AUCUN !
Nul besoin d'avoir des années de permis ou d'être un champion de l'équilibre pour conduire ces montures. Telle est la devise de Yamaha et de Rieju en proposant ces armes citadines ! C'est aussi ce qu'on a pu confirmer seulement cinq minutes après avoir enfourché les deux motos ! Comme des mômes, on se lâche un regard complice avant de se faufiler entre les caisses... et c'est à celui qui arrivera à se frayer le meilleur chemin !

Leur prise en main est immédiate. Sur le Tricker, la selle légèrement creusée accueille correctement le popotin du motard. Les repose-pieds assez hauts imposent une assise un peu trop pliée pour les grands gabarits, mais on s'y fait... Le plus déroutant au départ est le serrage des genoux contre le réservoir large comme une allumette. Le kick est un vieux souvenir et le démarreur électrique arrange tout le monde. Le monocylindre de 249 cm' et 19 ch est issu des XT et s'emballe sans nervosité. L'embrayage est très doux et le passage des vitesses se fait rapidement et avec précision. L'étagement court et le couple à bas et mi-régime dispensent le pilote de jouer avec la boîte. Un régal ! Ça tracte gentiment mais suffisamment pour trouver ça marrant !

Le Tango s'enjambe comme un vélo. Enfin presque... II est plus sage de redresser la moto avant chaque départ afin de ne pas se faire surprendre par le retour de béquille automatique. Votre cheville vous en remerciera ! Son moteur, un petit mono de 12,5 ch n'est autre que celui de la Yamaha XT 125. La petite espagnole souffre d'une boîte un poil trop dure, sans toutefois nuire exagérément au verrouillage des vitesses. Disposant aussi de rapports courts, sa plage d'utilisation efficace commence dès les premiers tours/min. Si l'on pousse le moteur dans les hauts régimes, il a tendance à s'essouffler assez vite. Rien d'étonnant pour un monocylindre! Mais sa motorisation n'est pas radine pour autant et procure bien des plaisirs... pour un 125 !

Si le cache-cache urbain entre les voitures permet de bonnes parties de fous rires, circuler en périphérie va compliquer les choses. Malgré des cylindrées qui autorisent le Tango et le Tricker à emprunter voies rapides et autoroutes, aucun des deux n'est réellement fait pour se déplacer ainsi ! Pour plusieurs raisons à commencer par la bagarre entre poids lourds et moto : avec une vitesse (compteur, donc vraiment maxi !) de 105 km/h pour le Rieju et 120 km/h pour le Yamaha, il
devient chose courante d'apercevoir dans ses rétros, le routier dans sa cabine en train de ruminer parce que vous le gênerez sur sa voie de droite. Et si le Tricker parvient à s'en sortir au jeu de l'aspi, le Tango abandonne tout duel ! Autre point critique sur de telles voies, les directions très légères louvoient si on ne prend pas l'indispensable précaution de ne pas du tout s'accrocher au guidon : pas facile avec leur poids plume... Pas très rassurant de rouler sur autoroute avec un guidon qui se balade de gauche à droite ! Mais il est évident que ces machines se destinent à d'autres terrains.

QUALITÉS URBAINES INDÉNIABLES
Une fois à l'intérieur de la ville, la petite espagnole et la japonaise s'expriment différemment. On sent tout de suite que ces machines ont besoin d'obstacles pour s'exprimer. Ainsi, on traque les skateurs pour pister leurs spots. Et à peine arrivés sur un lieu où les marches bloquent l'entrée d'un parc, nos positions changent et nos machines aussi... C'est comme ça qu'on s'est retrouvé debout sur les cale-pieds à monter et descendre les escaliers sans même s'arrêter! On fait demi-tour entre deux marches grâce à l'important angle de braquage, on marque une pause en surplace, on jette la roue avant dans le vide puis on se laisse aller. On se livre à quelques sauts sans voir la hauteur qui nous sépare du sol, facile... Les quelques passants, habitués à la présence des vélos ou des skateboards, sont intrigués par la facilité de franchissement de nos deux jouets. Pourtant, on n'a pas 15 ans, on ne sèche pas les cours de maths, non, mais il n'y a pas d'âge pour ces enfantillages... C'est juste par politesse envers les clients de la terrasse d'en face, que nous stoppons notre récréation une petite heure. Les quelques rues qui nous séparent d'autres spots ne suffisent pas à nous calmer. Le Tango profite d'un excellent freinage pour se pointer au feu sur la roue avant. Son très bon mordant et sa puissance donnent confiance, contrairement au Tricker qui demande à ce qu'on tire franchement le levier pour obtenir de la puissance. Le freinage arrière à simple disque se dose convenablement sur chacune des machines. Les suspensions du Tricker offrent une étonnante tenue de route, presque supermotard, où il est difficile de trouver les limites. Le Tango hérite de suspensions fermes qui incitent à une conduite plus sage. Mais les pneus enduro montés d'origine sur nos deux acrobates les rendent imprécises sous la pluie.

Très peu bruyants, le Tango ou le Tricker font jeu égal aussi côté conso. Quelques pièces de monnaie suffiront pour le plein : 4l / 100 km pour le Yam' contre 3l / 100 km pour le Rieju. Mais en raison de leurs faibles réservoirs, le Tango 125 et le Tricker 250 interdisent les grandes excursions hors des villes. Malgré tout, les petits sentiers accueilleront volontiers ces espèces de trials sans grosses difficultés.

BILAN
Ces machines incitent à tellement de fantaisies qu'il faut se raisonner pour ne pas faire n'importe quoi, n'importe où. On doit le respect à autrui. Attention à ne pas se laisser emporter par la facilité de ces délirantes petites motos. Reste qu'à 4 495 € le Tricker ou 2 799 € le Tango, ça fait cher le jouet... Personnellement, je choisirais plus un Tango pour la ville qu'un scooter... histoire de me défouler chaque fois que l'occasion se présente, ou réinventer chaque jour mon trajet boulot-dodo, sans rester forcément sur le bitume. Une garantie de début de journée souriant ! *

Julien LESSIGNY

* On est d'accord ;-)

Rectifications :
  • Le bouchon d'essence est muni d'une VRAIE serrure !
  • Toujours pas de témoin de réserve ni d'horloge à ce jour !